Notez bien que je n’ai rien contre le paranormal. Tout ceci est affaire de croyances, et chacun a le droit d’avoir les siennes, bien évidemment. Mais, comme le disait si bien Jean Ferrat (dans La Montagne, sa chanson-phare) : « Il faut savoir ce que l’on aime » (et, le cas échéant : « rentrer dans son H.L.M., manger du poulet aux hormones… »). Autrement dit, appliqué à notre propos, il faut savoir choisir les croyances qui nous conviennent le mieux, puis être consistant avec ces choix… sous peine de patauger ad vitam æternam dans la mélasse de la confusion.
Pour ma part, m’étant embarqué pour une croisière au long cours sur la mer — suffisamment vague, comme ça — de la psychologie, j’ai choisi de me limiter à la logie sur la psyché (le discours sur l’esprit), laissant à d’autres le soin de discourir sur les arcanes de la para-psyché (tout ce qui se trouve à côté de l’esprit). Voilà tout.
Et, pour la psychologie, vous vous en doutez, les rêves prémonitoires n’ont absolument rien d’occulte.
Outre le mécanisme de prophétie auto-réalisante, préalablement décrit — qui se déclenche, rappelons-le, dès qu’une interprétation est proposée par un tiers bénéficiant d’une légitimité suffisante (ou, à la rigueur, par le rêveur lui-même), conformément à la règle d’or talmudiste-constructiviste : « Tous les rêves marchent selon la bouche » —, les rêves prémonitoires rendent principalement compte de la survenue de deux formes de coïncidence… on ne peut plus communes et naturelles.
À savoir, la concomitance, et la corrélation.
Lorsque deux phénomènes se produisent simultanément, ou successivement (comme c’est le cas pour le rêve prémonitoire et l’événement prédit), alors qu’il n’existe, entre eux, aucun lien d’aucune sorte, on parle de concomitance.
En voici une illustration, positivement jubilatoire, observée en Alsace, avec constance, depuis plusieurs décennies : alors que la natalité ne fait que décroître, les ornithologues déplorent une chute comparable du nombre de cigognes…
Le fait que l’événement prédit succède au rêve prémonitoire peut donc être, pareillement, le seul fruit du hasard, un simple concours de circonstances… certains gagnent bien à l’Euro Millions !
On parle de corrélation, en revanche, lorsque les deux phénomènes qui se produisent simultanément, ou successivement, sont, de surcroît, reliés entre eux. Mais pas nécessairement par un lien de causalité. Les deux phénomènes peuvent très bien avoir une source commune, laquelle constitue, dès lors, un facteur tiers sous-jacent.
En voici, derechef, une illustration parfaitement réjouissante : les personnes qui font du ski vivent généralement dans des appartements dont le loyer est cher… mais ce n’est pas en augmentant le prix des loyers que l’on permettra à davantage de personnes de s’offrir les sports d’hiver ! Ces deux phénomènes — « ski » et « loyer cher » — sont conditionnés par un facteur tiers sous-jacent : « avoir un bon niveau de vie ».
De même, le rêve prémonitoire et l’événement prédit peuvent avoir, tous deux, une source commune, un facteur tiers sous-jacent… duquel peuvent sourdre de petits signes avant-coureurs (« prodromes », dans le jargon médical).
Dans ce cas, le rêve prémonitoire sera engendré par la montée à la conscience de ces signes subtils, enregistrés en toute discrétion, et restés, jusque-là, subliminaux (c.-à-d. sous le seuil de la conscience). Et si ladite montée se produit à la faveur du sommeil, c’est par le truchement de deux mécanismes mentaux spécifiquement morphéiques : l’incubation du matériel inconscient, et l’affaiblissement des défenses psychologiques.